Réforme territoriale
19 septembre 2014
Amendements proposés au projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
LA VERSION IMPRIMABLE DE CET ARTICLE EST ICI (PDF)
Le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite loi NOTRe) a été présenté en Conseil des ministres le 18 juin 2014[1]. Il s’agit d’un texte important, qui modifie en profondeur les règles du jeu en matière d’aménagement du territoire, de développement économique et de répartition des compétences, et en filigrane l’organisation territoriale des services de l’État.
Ce texte doit mobiliser les associations et de leurs instances de coordination, car il risque en l’état de conduire rapidement à une instrumentalisation complète des associations de niveau départemental et régional, dès lors que celles-ci n’auront plus qu’un seul financeur. Il risque également de reporter sur les communes et leurs groupements la totalité du soutien aux associations locales, qui représentent l’essentiel du tissu associatif. Enfin, en ignorant la participation citoyenne et la nécessité d’instances consultatives, il rend difficile la co-construction des projets de territoire, pourtant mentionnés dans le titre 2 du projet de loi.
Ce document propose une série de propositions d’amendements pour renforcer la dimension participative du développement territorial et permettre aux associations de d’y jouer pleinement leur rôle. Certains de ces amendements sont sans doute repris dans le cadre de « l’amendement Dinet »[2] élaborés par un groupe réuni à l’initiative de Michel Dinet depuis 2013 celui-ci propose également d’autres amendements que soutient le CAC, notamment pour rendre obligatoire des conseils de développement pour l’ensemble des structures intercommunales et préciser leur fonctionnement. Par souci de simplification nous n’avons pas repris ici l’exposé intégral de ces amendements, qu’on pourra trouver sur le site de l’UNADEL.
Définition de l’éducation populaire, l’égalité et de défense des droits et causes et le respect de l’environnement comme des compétences partagées (art. 28)
Exposé des motifs
Cet article est le plus court de la loi est l’un des plus importants pour les associations. En effet, il atténue pour 3 secteurs importants de la vie associative les effets de la suppression de la clause de compétence générale. Il permet des cofinancements dans ces 3 domaines, ce qui est essentiel pour la poursuite de l’action associative. Cependant, il est indispensable de compléter cet article en mentionnant l’environnement, l’éducation populaire, la défense des droits (celle-ci est mentionnée dans les compétences du département pour les seuls publics dont le département à la charge) et le respect de l’environnement.
En effet, la justification de l’exposé des motifs de la loi s’applique également à ces secteurs « si la clarification des compétences commande de limiter les interventions des régions des départements au domaine de compétences qui leur sont reconnues par la loi, il apparaît nécessaire, au vu de la diversité des situations et du caractère transversal de ces domaines, de maintenir une possibilité d’intervention de chaque niveau de collectivité en matière de culture, de sport et de tourisme ».
Ajouter à l’article 28
Les compétences en matière de culture, de sport, de jeunesse et d’éducation populaire, d’égalité et de défense des droits et causes, de respect de l’environnement et de tourisme sont partagées entre les communes, les départements et les régions.
Introduction d’un article définissant un Projet de territoire
Exposé des motifs
L’énoncé du Titre II de la loi « Des intercommunalités à l’échelle des bassins de vie, au service de projets de territoire » tranche le débat entre des intercommunalités de répartition des services et des intercommunalités de projet (au sens de projet global de territoire). Mais le projet de territoire n’est pas défini.
Cet article nouveau vise à définir le projet de territoire comme un projet global d’aménagement et de développement, co-construit avec les acteurs du territoire. Ceci permet de faire de l’élaboration des projets de territoire l’un des lieux principaux de la participation citoyenne, notamment dans les territoires ruraux et périurbains. En effet, l’absence de participation citoyenne dans ces territoires est une des principales sources de montée de la violence et de désespérance civique. Cet article s’inspire des dispositions adoptées pour les métropoles, en y ajoutant la dimension participative.
Ajouter un article 21 bis
Un ECPI à fiscalité propre élabore et conduit un projet d’aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social de son territoire, afin d’en améliorer la cohésion et de concourir à un développement durable, participatif et solidaire du territoire avec le souci d’un développement territorial équilibré. Ce projet doit être compatible avec le schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire et avec les orientations de développement social définies au niveau départemental qui le prennent en compte.
Il est co-construit, réalisé et évalué avec les instances consultatives du territoire, les acteurs et les citoyens.
Observatoire national des pratiques de la concertation et de la participation
Exposé des motifs
Le développement des pratiques de concertation et de participation nécessite un lieu de capitalisation et d’échanges d’expériences, d’analyse et de réflexion collective. Il s’agit via cet observatoire national d’observer, d’analyser et d’apporter des préconisations visant à améliorer les processus participatifs la lisibilité des enjeux (à quoi ça sert ? qu’est-ce que l’on vise ?), les méthodologies, la transparence de l’information, l’accès à l’expertise et aux données.
Cet observatoire pourrait aussi contribuer à définir ce que serait « une clause de qualité démocratique » et soumettre des propositions de renforcement du rôle des associations dans l’éducation populaire et l’animation de la vie des territoires, tout en faisant la promotion des expérimentations et expériences de pratiques participatives menées dans les territoires locaux, urbains et ruraux. Il pourrait s’appuyer sur des moyens du Commissariat général à l’égalité des territoires et de la commission du débat public, mais devrait également faire appel à des contributions de collectivités et de réseaux associatifs.
Ajouter un article 21 ter
Un observatoire des pratiques de la concertation et de la participation est créé au niveau national. Il aura pour mission de valoriser les pratiques participatives, de les analyser et de les faire connaitre. Il pourra mener pour cela des travaux de recherche et d’expérimentation. Il associera des représentants d’EPCI, de conseils de développement, d’associations et d’établissements publics engagés dans des démarches participatives, des personnalités qualifiées, afin de favoriser la mutualisation et les échanges de bonnes pratiques.
Il proposera des modalités d’évaluation de la dimension participative des politiques publiques, ainsi que la définition d’une clause de qualité démocratique avec un processus d’actualisation ; cette clause incitative devra figurer dans les modalités de financement de tout projet public.
Lieux d’exercice de l’engagement citoyen
Exposé des motifs
L’action publique est conduite pour une part par l’Etat et les collectivités, mais est également assurée par la mobilisation quotidienne des citoyens au service du bien commun. La loi leur permet de s’associer entre eux par diverses sortes de structures associatives et coopératives notamment. Mais l’élaboration d’un projet d’engagement citoyen nécessite une longue et laborieuse phase d’émergence qui nécessite l’appui public. C’est pourquoi, à l’instar de ce qui existe déjà pour favoriser et appuyer l’accueil de porteurs de projets économiques (et donc à visée souvent lucrative), il est proposé que toute collectivité bénéficiant de la clause de compétence générale mette à disposition de tout citoyen ou groupe de citoyens de son territoire un ou des lieux permettant l’émergence de projets citoyens. Ces lieux, ouverts à tous sans nécessité d’être déjà constitués en association, sont complétés par une ingénierie d’accompagnement de projet comme dans le domaine économique.
Texte proposé :
« Toute collectivité territoriale disposant de la clause de compétence générale met en place, directement ou par délégation à un autre niveau de collectivité, au moins un lieu d’accueil de porteurs de projets d’engagement citoyen. Ces lieux, ouverts à tous sans nécessité d’être constitués en structure, sont complétés par une ingénierie d’appui à l’émergence de projet. »
Extension des conseils de développement à l’ensemble des territoires de projet
Un ensemble d’amendements propose de rendre obligatoire pour l’ensemble des territoires de projet la constitution d’un conseil de développement (notamment communautés de communes, pôles d’équilibre territoriaux et ruraux, parcs naturels régionaux, aux parcs nationaux, aux pays, aux métropoles, etc.). Ce conseil est composé de représentants des milieux économiques, sociaux, culturels, éducatifs, scientifiques, environnementaux et associatifs. Les conseillers métropolitains et communautaires ne peuvent pas être membres du conseil de développement.
Chaque conseil de développement s’organise librement. Il est consulté sur l’élaboration du projet de territoire, sur les documents de prospective et de planification, ainsi que sur la conception et l’évaluation des politiques de développement durable et toute autre question relative au territoire, dont ils peuvent également s’auto saisir.
Dans la mesure où le contenu de ces amendements fait encore l’objet de discussions, nous n’avons pas restitué le détail des propositions. On pourra les retrouver prochainement sur le site de l’UNADEL lorsque la rédaction sera stabilisée.
Pour une vision d’ensemble synthétique du projet de loi, on pourra se reporter au tableau de présentation élaborée par le collectif des associations citoyennes (voir ICI), ou à l’exposé des motifs de la loi, relativement facile à lire, ou au texte littéral du projet de loi, précis mais très difficile à lire car il renvoie souvent au code des collectivités locales.
ICI une présentation simplifiée de la réforme territoriale réalisée par l’UFISC et orientée sur la Culture
La même présentation en PowerPoint pour projection.
[1] Rappelons que ce projet de loi a été précédé du vote de la loi du 27 janvier 2014 d’affirmation des métropoles et d’un projet de loi qui modifie le découpage des régions et le calendrier électoral, adopté par l’assemblée nationale le 23 juillet dernier.
[2] de Michel Dinet, président du Conseil général de Meurthe-et-Moselle, avait pris en 2013 l’initiative de faire travailler une vingtaine de réseaux associatifs, dont le CAC, sur des propositions visant à renforcer l’engagement citoyen et la participation comme gage d’un meilleur fonctionnement d’une république décentralisée. Cette initiative avait été encouragée par le Président de la République et le Premier Ministre. Après la disparition accidentelle de Michel Dinet, le gouvernement est d’accord que des articles additionnels soient intégrés dans le projet de loi OTR par un amendement d’origine parlementaire, improprement « amendement Dinet » sur la démocratie participative.