Karibu aide les familles sans logements des Hauts de Seine
L’association Karibu a été créée en 1986, à la suite d’un accueil informel de jeunes marginalisés pendant 11 ans au domicile personnel d’Olivier CHAZY, qui était par ailleurs chargé de mission au ministère des affaires sociales.
L’opportunité d’une réhabilitation sur fonds publics du pavillon devenu insalubre a permis en 1986 de lancer un nouveau projet plus structuré et centré sur l’accueil de familles sans logements. C’est ainsi que le logement personnel d’Olivier est devenu une résidence sociale agréée par le Préfet.
Pendant 10 ans le suivi social a été assuré par les travailleurs sociaux de l’association la Parenthèse à Clamart, puis Olivier s’est mis à temps partiel professionnel et a repris l’accompagnement des familles.
Globalement une soixantaine de familles ont séjournées dans la résidence sociale Karibu et aujourd’hui, cinq familles, jeunes mamans issues de l’immigration avec cinq enfants en bas âge, habitent le pavillon. Elles doivent patienter environ 30 mois avant d’obtenir un logement, le département des Hauts de Seine étant classé quatrième en France pour la sur occupation des ménages.
En 2002, grâce à l’appui d’une famille originaire de Kinshasa, Karibu s’est implantée au Congo RDC et a développé une action en faveur des enfants vivant dans la rue, qui sont environ 20 000.
Dangereuse aventure dans un pays n’ayant pratiquement pas de services publics, ou la sécurité n’est pas vraiment assurée, les services bancaires peu fiables et la population en situation de survie.
L’association a pu être financée à deux reprises par l’ambassade de France mais s’est fait voler ses actifs par une petite agence fondée dans le cadre des programmes de la coopération allemande la GTZ, livrée à l’inconduite que rendait possible cette période troublée par la guerre. La GTZ a fait le choix de nier sa responsabilité sur ce vol tout en licenciant tous ses cadres dirigeant impliqués.
Aujourd’hui, apres dix ans de travail, plus de 500 enfants des rues ont été ramenées dans leur parenté et ont pu être nourris, soignés, scolarisés durablement. Le taux de rechute à la rue n’a été que de 4%.
Points forts
Quelles sont les difficultés rencontrées et les résultats obtenus ?
Contre toute attente une expérience temporaire est devenue celle de toute une vie marquant l’histoire personnelle de chacun et d’un petit réseau d’amis fidèles
Il est notable que cette aventure a été possible parce qu’elle a reçue à tous niveaux le soutien d’acteurs institutionnels, il n’est pas moins vrai qu’elle a été menacée tout autant par d’autres acteurs institutionnels et à d’autres périodes et qu’elle a due sa survie a la solidarité d’un réseau d’amis construit au fil des années et à la fibre sociale de quelques agents publiques.
Qu’est-ce qui facilite la réussite de l’action, qu’est-ce qui la freine, qu’est-ce qui l’arrête ?
Tout projet doit surmonter des obstacles inévitables, il réussira s’il est fondé sur une vision claire et profonde, portée avec persévérance, s’il est utile et s’il fait sens, s’il prend les leçons de chaque échec, s’il sait évoluer. Dans l’expérience personnelle d’Olivier, ce projet a trouvé sa force et son sens à la fois dans son engagement spirituel et dans la résilience de ses épreuves familiales vécues dans l’enfance et l’adolescence.
Rien n’a été programmé à l’avance mais une série d’opportunités se sont présentées et qui ont été saisies. Toutes allaient dans le sens d’une vie partagé avec un public de personnes précaire et un service rendu sur un enjeu fort de société.
S’agissant de l’engagement international, les obstacles sont particulièrement nombreux, le premier relève de la difficulté à constituer une équipe locale motivée, loyale, compétente, le deuxième relève de l’extrême difficulté à mobiliser des financements.
Quelle est la portée globale de cette action ?
Dans un monde de plus en plus paramétré, ou les exigences de rentabilité surplombent toute initiative au risque d’une déshumanisation générale, il a été possible de centrer un projet sur le partage de vie entre inclus et exclus, la rencontre des personnes précaires, l’ouverture à la diversité.
La violence et la désocialisation à la quelle nous assistons aujourd’hui passent le plus souvent par la désaffiliation sociale et familiale des nouvelles générations.
Honorer la famille et les cultures d’origine, être en dialogue avec tous, inscrire la rencontre dans la parenté et la longue durée, c’est favoriser cette réinscription, c’est préparer un avenir humanisé, et lorsqu’il s’agit d’adolescents c’est favoriser la construction identitaire positive.
En quoi cette action est-elle transférable ?
Chaque expérience est singulière qui s’inscrit dans la diversité des histoires personnelles, mais une partie de cette expérience peut être transmise qui repose sur les savoirs faire techniques, l’approfondissement des valeurs et du sens, la connaissance des aspirations et des représentations humaines
Pour quelles raisons cette expérience peut être considérée comme susceptible d’être porteuse d’alternatives ?
Trop de politiques publiques se contentent d’objectifs quantitatifs non concerté avec les bénéficiaires et non respectueux des aspirations profondes de ces bénéficiaires, quelques années plus tard les constats sont douloureux, fonds gaspillés, dégradation et rejet des offres, renoncements, mal être des bénéficiaires, perte de sens et parfois violence.
Remettre le dialogue au centre des projets permet de ressaisir le sens du service rendu et de contribuer à la réinscription des personnes dans leur projet de vie et leur lien social, c’est la condition d’une bonne politique publique.
Propos receuilli lors de la rencontre avec Olivier Chazy à Zagora (RECit) en nov 2012 (revue mars 2015)
http://karibu-asso.fr/