Impact social ? La solidarité, l’action collective et l’intérêt général exigent une autre politique
Le 15/10/20, mis à jour le 23/10/20
Communiqué de presseVERSION PDF ICI
Impact social ? La solidarité, l’action collective et l’intérêt général exigent une autre politique
Le 23 novembre 2018, M. ITIER, alors Haut-Commissaire à l’Économie Sociale et Solidaire, présentait son « Pacte de Croissance pour l’ESS ». Les propos du chef de l’État étaient clairs : « demain nous établirons un Social BusinESS Act ». L’Économie Sociale et Solidaire entre de plain-pied dans le Business. Il s’agit de réinventer l’économie capitaliste du 21ème siècle !
Aujourd’hui, avec la nomination d’Olivia Grégoire, chargée de l’économie « sociale, solidaire et responsable » auprès du Ministre de l’économie, c’est à une reprise en main du secteur que nous assistons. L’accolement du terme « responsable » est en soi significatif, tant il indique le sens de la démarche : inscrire l’ESS dans une économie soumise aux lois du marché.
Face à des interlocuteurs connaissant peu ce sujet, Mme Grégoire recycle à volonté les vieilles recettes qui ont précipité notre économie dans une fuite en avant « qui accroît les inégalités, concentre les richesses, limite la démocratie et détruit les protections sociales » comme le déclaraient déjà le Collectif des Associations Citoyennes (CAC) et le Mouvement pour l’Économie Solidaire (MES) dans un communiqué commun le 15 décembre 2018[1].
Le supposé bon sens de ces nouveaux « Contrats à Impact Social »[2] est mis en avant. Pour faire face aux « failles sociales et environnementales des politiques publiques », un investisseur prendrait « des risques » pour soutenir « une idée » et définir « des critères de résultat ». Ce qui est « innovant » ce serait qu’on fonctionne « au résultat ». Et une première enveloppe de 10 millions est dégagée pour « l’économie circulaire ». Suivront d’autres financements de ce type pour l’inclusion dans l’emploi ou la lutte contre le « sans-abrisme. Sauf que…
Les associations construisent cette solidarité au quotidien
« Faisons confiance aux acteurs de terrain ». Pourtant dans chacun des champs nommés ce sont des milliers d’initiatives locales qui existent déjà, portées par des acteurs associatifs ayant une forte expérience et faisant largement appel à l’engagement bénévole. Leurs résultats sont largement évalués par la puissance publique, et leur capacité à innover, trouver de nouvelles formes d’action sur tout le territoire, est reconnue. Avec la démarche de l’outil « Transiscope[3] » nous en recensons à ce jour plus de 30 000. Ce qui est nouveau par contre c’est l’appel fait à des investisseurs sur ce marché de la solidarité et de l’environnement. Dans cette logique, la « culture du résultat » évoquée amène à déposséder les acteurs locaux pour soumettre les actions aux intérêts lucratifs des financeurs.
De nombreux dossiers de presse révèlent le dessous de cette approche qui « bouscule les fondements de nos politiques sociales » (revue lien social, 2017). Aucune économie à attendre de tels dispositifs qui rémunèrent à terme les investisseurs avec un « bonus » bien au-delà des 10 % en fin d’opération, sans oublier les coûts exorbitants de l’entreprise chargée d’assurer la mission d’évaluation. Et quel apport pour la Société, quand les milliers d’acteurs associatifs travaillant sur les relations de « personne à personne » ne trouvent plus d’appui, la mission « vie associative et éducation populaire » sortant des radars du ministère.
C’est un pas de plus vers la mainmise du secteur financier sur les politiques sociales, la solidarité, l’écologie et la culture.
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[1] http://archive.associations-citoyennes.net/?p=13070
[2] Le CAC a déconstruit la pseudo-logique de ces CIS dans le livret « Quand le social finance les banques et les multinationales »
[3] Portail web des alternatives : https://transiscope.org